samedi 6 novembre 2010

Fragment appendice au discours amoureux


Tendre d'amour c'est désirer que l'objet aimé devienne sujet dans notre amour, dans notre "je" fatalement "je" (n'admettant d'autre sujet que lui-même), et dans notre relation à tous deux (relation qui pourrait alors n'être pas seulement réfléchie - je regarde l'autre et je m'y vois, moi et mon regard - mais réciproque - chacun sait et admet (et aime) que l'autre regardé nous regarde en retour)
tendre d'amour c'est donc désirer être deux quand bien même on est fatalement un.
on le sait - mais quand même

Ainsi l'amour n'est-il jamais qu'en puissance, jamais en acte -
mais dans la puissance même il y a de l'acte
Tendre d'amour c'est être déjà dans l'amour que l'on n'atteindra pas.
On n'y est jamais mais le dire c'est y être déjà.
Car, comme dit Barthes :
"(L'atopie de l'amour, le propre qui le fait échapper à toutes les dissertations, ce serait qu'en dernière instance il n'est possible d'en parler que selon une stricte détermination allocutoire ; qu'il soit philosophique, gnomique, lyrique ou romanesque, il y a toujours, dans le discours sur l'amour, une personne à qui l'on s'adresse, cette personne passât-elle à l'état de fantôme ou de créature à venir. Personne n'a envie de parler de l'amour, si ce n'est pour quelqu'un.)"
Roland Barthes, Fragments d'un discours amoureux

Réflexion


Réflexion : non pas regarder un objet et que l'objet nous regarde en retour (il ne s'agit pas de réciprocité) ;
mais peut-être regarder l'objet et se regarder regarder l'objet - dans cette mesure seulement, l'objet nous renvoie notre propre image (et notre rapport à lui - qui est, le regard). 
[c'est alors l'objet qui nous réfléchit, et non nous qui réfléchissons l'objet].

Mais pourtant ce n'est pas seulement cela réfléchir.

Le verbe "réfléchir-penser" est-il vraiment (consciemment) issu du verbe "réfléchir-refléter" ? 
Ou essaie-t-on seulement à présent de donner un sens plus dense au verbe "réfléchir-penser" en le pensant en rapport à cet autre verbe "réfléchir-refléter" ?
Y a-t-il deux verbes ou n'y en a-t-il qu'un seul ?

Est-on dans une recherche étymologique, dans une tentative de retrouver,
ou bien dans une tentative de création (créer plus de sens en un même mot - presque alors créer un nouveau mot) ?

Quoiqu'il en soit, on tend vers plus de sens ; mais savoir si l'on recherche quelque chose d'existant (ou ayant existé) ou si l'on cherche quelque chose de neuf permettrait de savoir comment chercher : doit-on regarder de près et restreindre le champ de regard pour faire le jugement précis et ne pas s'égarer, ou doit-on au contraire élargir le champ de regard pour faire surgir du sens de toute terre fertile, même étrangère (étrangère à l'étymologie du verbe "réfléchir", étrangère aux sens passés, à ce qui a déjà été, au passé lui-même) ?
Sommes-nous historiens ou artistes ? Quel moyen avons-nous choisi pour chercher le vrai ?
J'avance dans l'ignorance de ce moyen.


Post Scriptum : j'ajoute ce soir : peut-être faut-il d'abord faire le regard large avant de pratiquer la myopie voyante - probablement ensuite faut-il dans un mouvement interminable de va-et-vient aller de l'un à l'autre.
Se faire chercheur donc, par tous les moyens.


vendredi 5 novembre 2010

Arrêt sur regard


J'admirais (une fois encore) la beauté de la feuille d'un arbre (d'un arbuste cette fois-ci) - et soudain je compris que mon émotion n'était pas mue seulement par la beauté de cette feuille mais également par le signe* de nature qu'elle était (et, en tant que signe, elle n'est pas fragment de la nature, encore moins synecdoque, mais elle est la nature toute entière - elle contient en elle toute la nature et elle l'excède en cela qu'elle est, au contraire de celle-ci, matérielle) : ainsi, si j'eûs exactement le même objet sous les yeux mais que je le sûs artificiel (de tissu par exemple) il n'eût suscité en moi aucune émotion (ou du moins, l'émotion fût moindre).

*Signe, c'est à dire, conception de mon esprit : c'est moi qui décide de voir en cette feuille la nature entière.   Ainsi, c'est donc de moi-même que je suis émue ; ou plutôt : par moi-même.

Je recquiers divers objets pour pouvoir les transfigurer, pour avoir matière à transfigurer - les choses sont des interfaces entre moi et moi-même ; interfaces nécessaires car je dois avoir matière à transformer (/ou peut-être : car je dois croire sortir de moi).
Les objets extérieurs sont comme la surface d'une eau qui permet de transfigurer mon visage, mon corps, par le reflet troublé ("bouleversé"?) que j'en aie.
Pourtant ce n'est pas moi que je veux voir.
Mon regard se porte sur les choses et les transfigure pour que je puisse voir ce que je désire voir : par exemple, la nature.   Le fait que ces choses (que je fais signes) me soient extérieures me permet de me laisser tromper par l'illusion dont je suis l'auteur, ou plus exactement, le regard.

CEPENDANT : après cette découverte de mon illusion, mon émotion n'en est en rien affaiblie. C'est que, lorsque je touche cette feuille, je sens sa chair entre mes doigts : elle est bien un corps vivant extérieur à moi et cela suffit à me faire pleurer de joie. Je ne me l'explique pas.

lundi 1 novembre 2010

Élan de la brièveté


"Ce qu'il y a d'admirable dans le fantastique, c'est qu'il n'y a plus de fantastique : il n'y a plus que le réel." (André Breton)
Le fantastique est le lieu où l'irréel bascule dans le réel - alors, perte des repères, mais les repères n'ont déjà plus tellement d'importance.
Le rêve aussi - et les récits de rêve me permettent de travailler le fantastique.

Je pense que la forme brève donne force au fantastique -
et surtout : le fantastique donne force à la forme brève

Internet, entre lieu et non-lieu, 
Internet encore pour nous étranger, incompréhensible,
Internet, lieu qui n'est que frontières (et l'on ne sait jamais de quel côté on se trouve) :
Internet devient le lieu opératoire du fantastique

Internet par ailleurs, donnant un nouvel (un premier ?) avenir (venant déjà) à la forme brève

Internet alors, et j'y ferais éclater un fantastique bref : le trouble ne s'achève pas avec la fin de la lecture ; il commence avec elle.
Internet comme plateforme d'où l'on jette les fils - c'est dans ces fils que vit le Web:au-delà de lui-même,il commence là où il finit,il commence en ses fins,s'élance en ses marges.


Rimbaud cherchant une langue qui soit "de l'âme pour l'âme, résumant tout, parfums, sons, couleurs, de la pensée accrochant la pensée et tirant."
Lettre à Paul Demeny, 1871.

dimanche 31 octobre 2010

samedi 30 octobre 2010


Renoncer aux derniers rayons du jour qui font trembler d'or les feuilles en dentelle : pas même un suicide mais un meurtre.
Si le jour meurt chaque soir vers sept heures, ce n'est que du coup de notre regard détourné.


Qu'est-ce que croire sinon douter ?
Qu'est-ce que douter sinon croire ?

Vol de citation - depuis http://merlinades.blogspot.com


"Il existe une race, voyez-vous, les hommes qui portent en eux un clochard en filigrane, ceux qu'un rien rend heureux, un merle sur l'herbe, des lichens sur un mur, une flaque de soleil sur un arbre, ceux qui vivent pleinement l'instant, ils sont immortels, c'est pour eux que j'écris." - Jean Sulivan


Les autres citations en exergue qui encadrent celles-ci sont peut-être plus importantes encore - mais je vous invite à aller les voir de vous-même...

vendredi 29 octobre 2010

Un rêve |


Un rêve : | après-midi d'éclats, éclats d'enfants aux rires claquant sur la surface de l'eau, ils sont nombreux dans la piscine cet après-midi-là °
grande famille, amis, toute une société réunie, insouciance, joies

Je parle avec des amis, ma joie n'est pas celle des enfants mais j'entends pleinement la leur, il se peut qu'à ce moment-là j'ai eu une petite altercation avec un ami, ou seulement une discorde, on n'est pas tout à fait d'accord,
on rentre à l'intérieur, dans la maison, pour vérifier quelque chose probablement.

Je sais que par la suite je monterai l'escalier.

Et c'est alors seulement, regardant par la fenêtre, je noterai un léger changement dans la rue au-devant de la maison.
Le détournement de mon regard court-circuité, je retourne le regard vers la rue pour vérifier - savoir à quoi tient cette impression d'étrangeté
Et là je remarque que la rue est un peu plus large qu'avant, et comme plus lisse
Je regarde un peu plus encore, et je vois enfin, je vois enfin que la nature-même du sol à changé - le bitume a laissé place à une sorte de boue noire,ou grise, qui semble crevée de bulles bouillant peut-être - la couche ne paraît pourtant pas épaisse

Je redescends l'escalier, retrouve les trois personnes avec qui j'étais entrée dans la maison.

Je jette un coup d'oeil dehors : plus personne.

J'interroge mon amie du regard 

Je ne sais pas si ce fut un geste ou un regard de sa part, mais je compris : 

tous avaient été engloutis par cette marée de boue, pas un ne restait.


Si tout du long de mes jours de mes nuits je fraye, enfonçant la terre des ongles en sillons
[étant, comme l'amoureux, "dis-cursus", c'est à dire, "originellement, nous dit Roland Barthes, l'action de courir çà et là, ce sont des allées et venues, des "démarches", des "intrigues". L'amoureux ne cesse en effet de courir dans sa tête, d'entreprendre de nouvelles démarches et d'intriguer contre lui-même."*]
Si tel l'amoureux je travaille à épuiser le souffle qui me travaille, dans une course que la plupart du temps j'ignore, dans une course qui n'a ni sens ni direction - nulle autre direction que l'épuisement,

C'est que je tends à rejoindre |

Si je cours au-devant des jours et des nuits , au-devant de ce temps qui entend me donner le rythme mais échoue ,
si je donc je cours dans mes nuits dans mes jours échouant sur les rivages de l'aube le corps naufragé et tremblant

Si les mouvements comme danser [et la danse parfois laide] parce qu'on a depuis longtemps refusé de faire prendre à son corps une direction 
parce qu'il est bien entendu que l'on rompt à chaque seconde avec les schémas organiques qu'ils ont faits pour nous -et comme bâtis de l'intérieur ont-ils cru-

Si l'on court en étoile anarchique plutôt qu'en flèche, en comète perdue loin des planètes et de l'espace géoréférencé des systèmes de l'univers,

Si je. cours. si je cours et vous qui me voyez au bord du trottoir vous qui ne passez pas le pas, vous qui stupéfaits voyez un être de chair sans schéma organique, sans schéma
faire vibrer les étoiles de l'air parce qu'à le chercher de la bouche elle s'épuise et souffle
,ô souffle qui fait trembler les poussières invisibles de l'air,
Vous qui stupéfaits ricanerez lorsque revenus de votre stupeur atemporelle vous devrez recouvrir la découverte et vous en protéger

Vous n'avez qu'un pas à faire, de l'autre côté du trottoir, passer de l'autre côté du trottoir.

Encore une fois je m'égare : les discours : dis-cursus : c'est, originellement, nous dit Roland Barthes, l'action de courir çà et là, ce sont des allées et venues, des "démarches", des "intrigues"
l'écriture aussi c'est ma danse sans schéma organique

Si tout du long de mes jours de mes nuits je fraye, enfonçant la terre des ongles en sillons, de la pointe du stylet et du pied tendu et ourlé,
Si je fraye tel un monstre souterrain furetant dans la terre sans y voir creusant des galeries sans sens et peut-être n'y a-t-il aucune galerie derrière soi après tout,
on ne sait pas

Si je fraye en tout sens sans sens de mes ongles, du pied, du stylet,

Si tant de mouvements je cours et je m'épuise,

C'est que je cherche à rejoindre |


            Rejoindre quoi ?     Rejoindre ce qui seul se rejoint : l'image immobile.


Si jamais tu me voyais courir jusqu'au bord de l'épuisement, là où les aubes éblouissent et l'on ne peut plus voir, 
il faudrait que tu saches :

Si je cours tant gesticule remue-ménage c'est que je cherche à rejoindre : l'immobilité.

Tant de mouvements de tensions de vitesses pour : immobile.


Cette immobilité m'est antérieure. elle est aussi au bout, certainement, de quoi je cours.


Cette immobilité ne m'est absolument pas antérieure, absolument pas à venir.

Elle ne viendra jamais ne fut jamais. Elle est là de tout temps de toute Eternité.


Voilà que je pars encore avec en tête des Désastres** qui sont comme la nuit noire partout autour de vous et de tout temps

Il ne s'agit pas de cela. pas précisément de cela.

Reprenons notre course.


Si jamais tu me voyais courir il faudrait que tu saches.


Je cours toujours mon corps en étoile sans schéma tendu à rompre gorge


Si je cours tant c'est que je cherche à rejoindre | quoi ? l'immobilité.

Cette immobilité est la grande image qui fait tenir mon corps comme une carte et le déploie

Cette image c'est tout ce que je sais [elle annule tout savoirs]


Je cours chaque jour j'arrache avec les dents ces écrans animés de toile de fausse toile ces écrans aux couleurs en fuseaux qui me jettent me projettent dans un mouvement qui n'est rien tellement absolument rien 
ces écrans ces toiles de cinéma ne font qu'eux s'interposer entre moi et mon image ma grande image immobile


J'oublie souvent que je cours pour l'immobile.


Il est clair cependant que je cours pour l'immobile.


Ma grande image immobile est une absolument une.

Elle m'apparaît cependant sous des figures changeantes 

Ma grande image c'est tout le savoir qu'il y a en moi (c'est tout ce qui me dépasse et n'est qu'à l'intérieur de moi),
souvent pourtant je l'ignore - 

De rares fois toutefois, sans que je puisse en connaître la cause qui provoque, une de ses figures surgit et fait sentir à mon corps sa présence

l'image m'apparaît alors dans un rêve, dans une crise de larmes ou dans un texte, très court.

Que des rêves et que des textes qui sont autant de crises de larmes.

Car il est évident que cette image immobile est de la même nature que les larmes. j'ignore l'analogie exacte qui les mesure l'une à l'autre - mais il est évident qu'elles ont à voir avec le même.

Les figures surgissant l'image marquent mon coeur d'une étreinte très profonde, d'une empreinte très profonde -
l'image ainsi, ne se manifestant à moi-même que de rares fois dans une vie, ne se fait jamais tout à fait oublier.

Je vis dans le souvenir de ces figures. Ces figures comme autant de souvenirs de ce qui est toujours présent et que j'ignore. l'immobile.

l'immobile parfait. Car il est entendu que le parfait est l'immobile.


c'est d'une empreinte si forte.toutes ces larmes.
ce sont les larmes qui creusent en moi ces petites cavités invisibles de ceux de loin
et qui font sentir terriblement la sécheresse des courses infatigables 


cette image,il faudrait que je ferme les yeux pour figer un instant une figure,
l'une de ces figures dans lesquelles elle m'apparaît {
sous toutes ses figures il est entendu qu'elle est toujours la même.

elle est d'une parfaite douleur
d'une douleur entière
immobile 
tellement claire

elle est de ce rêve que je cherche à rejoindre consciemment lui en revanche
ce rêve où je devais être d'à peine sept ans huit ans et pourtant j'ai fait ce rêve
comment aurait-on pu avoir un si grand savoir, un si grand savoir de la douleur . de l'immobilité,
si ce savoir n'était l'image de laquelle notre chair même est faite et nos os et nos sangs
notre coeur dans sa grosse chair rouge rien d'autre que cette immobilité qu'il tend à rejoindre

La grande immobilité à laquelle je donne si souvent des figures amoureuses
- sans que ces savoirs extérieurs qui me rongent ne parviennent nullement à ruiner l'image -

La grande immobilité qui n'est ni retour au foetus ni l'horizontalité après la plongée dans la mort

Non ce n'est rien de cela dont je vous parle

Je ne pourrais de toute façon vous parler que des figures de l'immobilité 
et ces figures ne vous diraient rien

Moi seule je sais je sens que je cours à cette immobilité |

Et pourtant, dans ces éclairs de l'immobilité qui parfois surgissent dans mes "rêves", les figures apparaissent toujours sous forme de dualités

Dans cette grande immobilité c'est mon front contre ton front et les larmes qui empoignent nos deux coeurs comme dans un seul poing
il y a dans mon immobilité des larmes mon front contre ton front une douleur-

Si je cours contre moi-même en intrigues douteuses tel l'amoureux égaré de barthes 
sans doute est-ce que je tente d'arracher au mouvement cet autre sans lequel rien n'est possible - et sans lequel, sans doute, l'immobilité n'est pas.



*Fragments d'un discours amoureux, Roland Barthes
** L'Ecriture du Désastre, Maurice Blanchot

Ca y est ! Après 27heures d'éveil-brouillard je tiens enfin ce cristal - et alors mon beau stylet je l'enfonce dans la page et arrache les peaux mortes, découvre les formidables organes et les circulations - les circulations

le stylet ce soir - ce matin ? dans quel temps sommes-nous ? ne tracera pas le sillon de mon style
mais suivra les artères et artérioles du grand arbre
s'enfoncera sanglant dans les carrières des cristaux qui se taillent

j'ai un stylet-cristal comme une torche pour vous suivre dans la grand-nuit


Comme on a tort quand on croit qu'une [seule] personne a raison !

jeudi 28 octobre 2010


Nous pouvons distinguer -
une écriture qui pose, et cherche, au plus juste -
une écriture qui se laisse entraîner par sa névrose interne.

Passer de la seconde à la première -
non pas pour un "équilibre" que l'on établirait ainsi -non, il ne s'agit pas de fixer-
mais pour sortir de soi.
sortir aussi de la structure Cercle, avancer.

cependant encore lâcher bride parfois.pour en un élan retrouver souffle.


Serais-je totale névrosée ?


jeter des éclairs dans les jours ternes

A la nuit


Yeux écarquillés dans la nuit où je refuse nuit après nuit de dormir
et les langues qui partent en fuseaux depuis les écrans de lumière éclatés sur la page éclatés soudainement tel bourgeon éclot éclate violemment tout son sang coquelicot sur la page noire de nuit
et les yeux malgré lunettes après lunettes superposées ne voient bientôt plus que ces jets noirs et blancs et couleurs sur la page et plus grand chose d'autre
tout flou tout flou je peine à voir ce que j'écris aussi je tente de tomber poussière de l'écran des cils de cornée mais rien à faire
cherche la pierre sous la terre tasse la terre sur les côtés tente frayer chemin parvenir aux sites naufragés on se hisse sans savoir si l'on est invité mais on voit la main tendu à n'importe qui viendra
alors je ne vois pas ce qu'il me dit, suis devenue aveugle,
devrais apprendre par coeur les langues pas encore nées des pages à venir pour sauver du naufrage les dialogues et ne pas hisser seule dans l'arche sa solitude (toute petite,toute fermée,toute stupide comme au premier jour,premier jour toujours chaque matin,on n'a rien appris quand le sommeil est venu écraser la nuit sur notre crâne)
ne peux me relire j'écris je décharge je porte l'honneur dans la nuit à ceux qui écrivent la nuit je vous sais tous de nuit vous qui ouvrez fenêtres claires dans opacité grise brouillard des jours et des nuits (la couleur inchangée jour/nuit)
je porte l'honneur comme un cri à ceux-là qui écarquillent mes yeux dans la nuit travaillent à ma myopie pour mieux voir ce qui se trame sous les mots soi-disant toujours les mêmes
je pousse les mots en avant de mon aveuglement parce que grâce à vous je sais que chaque mot est différent et porte en lui peut-être toute une puissance à nous de la révéler toute une puissance de révélation c'est le mot qui révélera le monde c'est pas toi toi tu ne fera que le porter le hisser à surface et ce sera déjà pas mal
alors je me cramponne à l'ancre de nuit volage qui fait jaillir parfois artifice lumière crue frappante surgit et on se frappe la tête lorsque passant flirtant de pages en pages de lieux à lieux on se frappe soudain à ce surgissement que l'on croyait chercher que l'on ne cherchait guère que l'on ignorait chercher mais c'est bien lui dans la nuit qu'on cherchait les yeux écarquillés c'est pour ça les yeux brouillés flous aveugles c'est pour ça c'est pour voir enfin, voir (

mercredi 27 octobre 2010

Pour un Décembre


Souvent la sensation de courir jusqu'au lieu où je pourrai enfin me reposer mais ce lieu ne surgit jamais.

Voudrais passer décembre ouaté de neige dans les grands boulevards et les opéras de lumière _
      , écouter du jazz en épluchant les légumes, dans une atmosphère de confort sentimental
  ,  marcher dans l'odeur des soirs d'hiver, dans les grandes rues et les marrons chauds dans les mains, sur fond de cliché sentimental de chanson parisienne presque,
être l'amoureuse comme on est l'enfant comme on est la mère
confort sentimental du silence des loupiotes qui s'éteignent
confort sentimental de l'enfant devenue mère
confort sentimental et plus l'on répète ces mots plus ils se figent en un cliché étranger,      on ne sait pas ce que ça veut dire.

mardi 26 octobre 2010

Lorsque l'on est fâché d'être séduit - là où la morale est hypocrisie et où le journalisme abdique

Lire avant :

Phénomène, oui, mais pas tel que l'entend le journaliste -
non pas phénomène manifestant la décadence de la nouvelle génération adolescente -
bien plutôt expérience phénomènale par laquelle on tente de parvenir à une expérience nouménale...

Trève de plaisanterie, outre que l'article abaisse au vulgaire l'expérience des limites - expérience qui touche au métaphysique et au poétique (faut-il le démontrer ? cela ne se démontre pas, cela s'éprouve, s'expérimente et se vit)
il est flagrant et tout à fait comique de noter à quel point le journaliste se dupe lui-même - on peut certes lui reconnaître l'habileté de parvenir à duper également nombre de ses lecteurs ;

En effet ! ce protecteur de la cause publique&morale ne se laisse-t-il pas lui-même séduire par ce monde de beautés étranges et semble-t-il dangereuses ? Qu'en est-il quand l'anatomie est arrachée aux sciences pour la rendre à la poésie ? Lorsque la chair d'une jeune fille est marquée par l'esprit, que la "cuisse" se fait "fine" et le mollet "nerveux" ?

Qualificatifs littéraires et séducteurs, lorsqu'un mollet devient "nerveux", donc, mais aussi images invitant au rêve (formaté, le rêve) : les jeunes filles de ces soirées ont-elles toutes des "mensurations parfaites" ?

Et lorsque les fantasmes figés du journaliste ne font pas que déformer les photographies mais glissent aussi entre chacune d'elles des images subliminales, cela donne une catin pubère qui s'enfuit "un nounours en peluche dans une main, un mec brun dans l’autre, dans un coin plongé dans l’obscurité" - tout ce que cela charrie d'angoisse et de désir frustré, je vous laisse en juger.

...On accuserait presque le journaliste de voyeurisme si l'on ne soupçonnait pas que les visions les plus charnelles ne soient que fantasmes sans chair et visions intérieures...mais laissons donc le journaliste et ses lecteurs(ceux qui lisent suivant les lignes) dans leurs rêves ouatés ; là où est vu le vice le désir s'excite, laissons-les rêver à ce qu'ils (s')interdisent, eux dont la vie est cantonnée à des métaphores plastiques et à des flashs de rêve qu'ils n'ont fait que voler au cinéma - cela au moins, le journaliste le reconnaît : Kubrick référence merci !
La référence culturelle nous met à l'abrî de tout, et l'on est bien sûr d'avoir le patrimoine, grand et solide, derrière soi. Le journaliste ne serait-il pas lui aussi un tout petit peu pubère et un tout petit peu encore collégien à se féliciter de ses hautes références nouvellement acquises ?
Cependant : n'attaquons pas la référence (et nous n'attaquons pas Kubrick), il y a bien déjà assez à faire avec la réflexion du journaliste lui-même... la réflexion ??? là où le journalisme ne fait que mimer le geste numérique des photographies à répétition - abandonnant la tentative de donner en un cliché la perspective le mouvement qui fera penser.


dimanche 24 octobre 2010

Camille


"la-la-lalalère|la-la-lalalère" Cette gamine Camille est vraiment une reine 
une lumière de rue
chaque fois que de ma fenêtre je la vois ou l'entends, c'est un enchantement
Cette gamine Camille c'est une reine de la rue
Haute comme 3 pommes elle est toute la vérité du monde
Petite fée de ma rue, lumière qui chante au matin
J'aimerais tant la rencontrer, la saluer -
Mais on ne rencontre pas une reine : 
on la regarde de loin et on est tout impressionné
elle marque sur nous un effet monstre
et reconnaissants on la reconnaît comme notre reine
reine du petit matin dans la rue pluvieuse
comme je vous remercie comme j'aime votre joie votre sagesse toute grande et vos quatre ans tout petits
Camille ma Reine chantez le Matin éclos dans votre gorge
Faites vibrer le Vrai dans l'air chargé de pluie
Dites-moi encore et encore pourquoi je m'éveille 
pourquoi la rue est belle et respire
Camille Camille vous êtes ma beauté - je ne vous connaîtrai jamais.

Vita Brevis !


Vita Brevis!et que les siècles sont courts, amassés sur eux-mêmes,
que le coeur humain reste d'âge en âge semblable à lui-même, 
si cette lettre de Floria AEmilia à l'Evêque d'Hippone 
porte bien la date antique du cinquantenaire du bientôt Saint Aurèle Augustin !

Comme la parole de cette femme est simple et balancée (pesée sur balance), limpide et droite, garante de vérité par la modestie de n'en assurer aucune et de les envisager toutes,
face aux effusions des Confessions d'Augustin où la pensée va par sauts mais non par gambades, par ellipses et yeux clos (ou arrachés - Œdipe), où les certitudes révèlent les doutes, les angoisses -

Lettre à un homme qu'elle aime, lettre à un homme d'Eglise
Lettre en son nom, lettre où elle craint pour les femmes - pour la femme telle que le Christianisme la représente
" tu me flagellas pour avoir succombé à ma douceur. Tu me rendis ainsi coupable de ton désir. (...) Cela ne revenait-il pas à te castrer ? "
"Je tremble à l'idée de ce que les hommes d'Eglise risquent un jour de faire à des femmes comme moi. Non pas en tant que femmes, car c'est ainsi que Dieu nous as créées, mais parce que nous représentons des objets de tentation pour vous autres les hommes, tels que Dieu vous as créés. (...) Je frissonne, car j'ai peur qu'un jour les hommes d'Eglise ne veuillent nous supprimer. Et pourquoi crois-je cela ? Parce que ces femmes vous rappellent que vous avez nié votre âme et la nature de votre corps."


Toujours : lettre d'une femme à celui qui ne veut plus être un homme :
"Je ne crois pas en un Dieu qui détruit la vie d'une femme pour sauver l'âme d'un homme."


Soudain : contemporanéité du réel face aux mythes (l'Antiquité n'était pas du mythe mais du réel comme celui qui chaque jour nous passe sur le corps) : 


"Je ne fis pas comme Didon, je ne sus pas tenir la promesse que je t'avais faite sous le figuier, Aurèle. Et si j'avais pu avoir Adéoda avec moi, je n'aurais pas fait non plus ce que fit Médée. Je partis."


Lettre d'amour surtout, à celui qui ne veut plus (re)connaître l'amour : 
"Les oiseaux pour moi se sont tus. Les fleurs ont à jamais perdu leurs belles couleurs. Plus personne ne s'est penché sur moi pour respirer ma chevelure. Plus personne n'a posé ses mains sur mon corps. J'ai fini malgré tout par partager un peu le destin de Didon. Mais jamais rien ne me fera lâcher le camée que je serre dans ma paume."

samedi 23 octobre 2010


Je voudrais partir une semaine, rien qu'une semaine, tout oublier.
Au retour enfin pouvoir commencer
- que le corps soit blanc, non plus battu par sang et poison, et les os non plus rongés par le temps

Pouvoir enfin être dans, et non plus au seuil piétiné exaspérée

je crois que non
je vais tout simplement me faire doubler par le temps, devenir folle, n'avoir ni lieu ni tête ni temps

je pourrai commencer que je serai déjà en retard
j'étais tellement prête mais maintenant je n'ai plus le temps
le sang me bat les tempes et l'angoisse alors non, je n'écrirai jamais rien, je ne rendrai jamais mon mémoire, je n'aurai jamais
je continuerai à prendre le train le train cageots jour nuit jour nuit nuit jour chaque heure sera une rame dans laquelle je monterai chaque heure un peu plus abrutie encore chaque heure trop chaud le sang aux tempes le corps dégueulasse l'humidité noire des fonds de trains
chaque heure chaque heure chaque heure sera un train et je n'aurai qu'un bout de papier chiffonné où griffonner des mots débiles d'urgence d'angoisse

A qui puis-je dire ?

vendredi 22 octobre 2010


"Quand il se réveilla, dans l'obscurité de sa chambre chaude et fermée, il ressentit, avant même que la pensée se fût rallumée en lui, cette oppression douloureuse, ce malaise de l'âme que laisse en nous le chagrin sur lequel on a dormi. Il semble que le malheur, dont le choc nous a seulement heurté la veille, se soit glissé, durant notre repos, dans notre chair même, qu'il meurtrit et fatigue comme une fièvre. Brusquement le souvenir lui revint (...)"

Maupassant, Pierre et Jean 

depuis son propre vaisseau


et aujourd'hui, travailler à prendre le temps sur le temps qu'on n'a pas,
savoir où se placer, à quelle échelle,
savoir quelles actions nous reviennent,
faire indéliables la parole et l'acte

faire que la préparation ne soit pas une attente
que dans les actes se préparent toujours les actes
la pensée en mouvement
que les actes ne soient pas du formalisme
que les actes ne soient pas du formaté

pousser dans les marges
déplacer les lignes de front

Aborder des terres inconnues dans son propre vaisseau
tout voir depuis sa propre lunette mais toucher aussi, toucher la terre et la boue plein les mains,
savoir qu'on ne peut toucher que de ses propres mains
garder nos mains non pas intacte la peau mais profonde la chair

- aborder l'étranger depuis soi, il n'y a qu'ainsi qu'on pourra le (re)connaître -
Choisir l'angle de vue qui sera le nôtre
et si l'on déplace la perspective, que ce soit après s'être soi-même déplacé -
regarder depuis soi et non depuis un autre

- pour voir, choisir par où l'on regarde

Serais-je résistant(e) ?

Question que chacun a à se poser tout en sachant que la réponse ne se donne qu'au présent.

Se poser la question pour se préparer à y répondre.


mercredi 20 octobre 2010


Quel enchantement d'être dans Paris ce soir !

(et ce disant je n'oublie pas les souffrances que j'ai croisées)

Post Post Scriptum


"Notre mort fait vrai cet énoncé" : il ne s'agit donc pas que la vie soit une entité insécable de laquelle on ne peut retrancher pas même la mort ou ne le soit pas : il s'agit de vouloir qu'elle soit cette entité insécable ; de le vouloir et d'agir en conséquent.
"Mourir ainsi c'est dire que la vie n'est plus la vie depuis qu'il lui manque ce membre" : ce dire est performatif - faire notre mort performative {acte et énoncé mêlés}

Post Scriptum


La mort d'Antigone n'est pas une défaite : elle est une victoire.

Elle dit, et vous pouvez l'entendre : "La vie vaut le coup, la vie mérite que je meurs pour elle"
Et ce faisant l'énoncé devint vrai...

Il suffit donc de vouloir la vie vraie, entière, sublime, pour qu'elle le devienne.

(Vouloir étant de l'agir, sans cela ce ne serait qu'un vague désir - et la frustration l'aigreur qu'il engendre)

à ceux qui disent qu'Antigone avait tord


"Notre mort fait vrai cet énoncé" :
On pourrait alors rétorquer qu'en ne mourant pas Antigone aurait également eu raison (ce qui revient à dire : Ismène avait raison) : En effet, sans mort, il aurait été prouvé que la vie n'avait pas besoin de la mort pour être vie entière - que la mort ne fut pas intégrée à la vie par le rituel de l'inhumation ne retranchait rien à la vie-même. 

Si l'on s'en tient à la seule mathématique, oui.

Mais voudriez-vous que la mathématique ait raison ?
Vous sentez bien au fond de vous que la mathématique n'est pas la (seule) raison

Qu'est-ce que la vie si l'on peut la grignoter ainsi, en commençant par ses marges (la mort), et en continuant continuant...jusqu'où ira ce grignotage ? Que restera-t-il de la vie si on la laisse être grignotée ?

Comment défendre la vie si on ne la conscrit pas à une entité dont on ne peut rien retrancher ? Qui pourra dire alors "non, n'allez pas jusque là, ne touchez pas à ça, ça c'est la vie ?" On lui rira au nez ! Qui est-il pour prétendre que la vie commence là et non juste avant ou juste après ?


La vie est à sauver entière ou ne sera bientôt plus rien. 

Alors : Résistance 


Pourquoi Antigone avait raison


Certains disent qu'Antigone n'avait pas raison. Je tiens cependant qu'Antigone est le personnage de Résistance et qu'elle est le seul personnage Sublime. Antigone leur rappelle qu'elle aime la vie plus que vous tous - qui est debout cinq heures pour les pieds dans les rosées et la tête à la lune et au soleil ? C'est parce qu'elle aime ainsi la vie qu'elle ne peut l'humilier la soumettre à ce qui l'opprime - atteinte dans ses plus extrêmes retranchements, lorsqu'on lui retire même la mort (mort arrachée à la vie, laissée sans rituel). Concéder quelque chose de la vie, la mort même, sacrifier amputer la vie dans ses bornes illimitées, c'est consigner la vie à rien moins que médiocre : c'est accepter que la vie ne soit plus entière ne soit plus sublime, c'est abaisser la vie à un médiocre accidentel. Ce qu'Antigone refuse.

En se faisant prête à mourir pour réintégrer la mort à la vie (enterrer son frère), Antigone redonne à la vie son intégrité sublime - et cela même si elle échoue. Si quelqu'un est prêt à mourir pour la vie, celle-ci devient à nouveau entière elle est accomplie jusque dans ses marges et s'en retrouve intacte.

Quel que fût ce qu'on imputait à la vie, ne pas l'accepter c'est nier cette amputation et celle-ci s'en trouve annulée. Il devient clair que ce membre arraché à la vie était bien du corps même de la vie, que la vie était faite de ce corps-là, puisque quelqu'un meurt pour ce membre - par l'arrachement de ce membre. Mourir ainsi c'est dire que la vie n'est plus la vie depuis qu'il lui manque ce membre.
Avant notre mort cela n'était ni faux ni vrai : notre mort fait vrai cet énoncé.

[N'étant plus dans la vie pour vivre cet énoncé devenu vrai par notre mort, nous faisons la vie vraie pour ceux qui restent en vie. Celui qui meurt ne perd pas la vie, puisque la vie sans sa mort n'était plus vie. En mourant, il redonne la vie à ceux qui restent en vie. Vivant, il serait resté mort parmi les morts.]

Lorsque c'est la mort même qui est amputée à la vie, on redonne la mort à la vie en mourant pour elle. Il devient alors manifeste que la mort et la vie sont faites du même pain, du même corps. Notre mort (dé)montre que la vie avait besoin de la mort pour être entière.



mardi 19 octobre 2010

Apnée

apnée de plusieurs mois. apnée de toute une vie. plus d'espace pour respirer. se contraindre à ne pas écrire parce que le temps presse et parce qu'on veut le temps. : décidé de ne plus écrire dans la précipitation. l'urgence. décidé de monter projet . projet d'une ville en construction. chantiers. chantiers d'une ville aux carrefours, carrefours, carrefours. je veux parler des rues, de ceux qui font les rues de leurs pas de leurs arrêts de leurs cris de leurs silences. mon espace d'écriture était tout petit tout petit cercle de fer autour de moi moi moi. ai décidé d'ouvrir mon espace aux autres. mais pour cela il me faut le temps : de penser. ne plus s'en tenir à l'écriture du corps, du senti. or, n'ai pas encore le temps. alors, j'écris de moins en moins, respire de moins en moins.
suis en apnée avant la respiration.mais après l'apnée – la mort ?
quand aurai-je la place pour mettre de l'air autour de moi ? pour respirer le même air que les autres ?
souffre de ne plus avoir d'espace partagé pour écrire. quand j'écris aujourd'hui cela reste dans mon traitement de texte : comme si rien.comme si cela n'existait pas.aussitôt évacué.ou plutôt gardé là sous cape sous silence.

deviens abrutie.jamais le temps de prendre le temps:prendre le temps pour penser,lire,écrire.penser les liens,penser les autres.

terrifiée et si je restais stupide? moi déjà toute petite,déjà ne sais faire que sentir,ai jamais rien su d'autre que sentir et regarder(n'ai jamais pensé)-alors si finalement rien.je vous regarde vous parlez tous une langue étrangère et moi je reste l'horreur putride de ce monde,horreur stupide putride.Vous,vous pensez vous vous approchez des grandes vérités avec vos petites mains et moi je ne suis même pas la terre sous vos ongles.vous vous approchez vous vous battez boue engluée au coeur et moi reste très clean dans les murs cimentés de la ville-gouverneur.moi même pas capable de faire la révolution.de résister. Moi qui ne m'approche de nul langage,de nulle pensée.
donnez-moi le temps pour apprendre votre langue,pour vous rencontrer
je ne suis pas totalement mauvaise
veux venir gratter la terre moi aussi -petite Antigone Comme Antigone je sors cinq heures du matin pour pieds nus dans la rosée marcher embrasser l'écorce la terre devenir sale du monde et pierreuse - les rosées comme des larmes des larmes
Je dois apprendre les heures suivantes d'Antigone : comment résister à la tombée du jour venir gratter la terre et tout le jour ne pas répondre à Ismène être tendre avec nounou
Devenir résistance : pour cela princesse avoir le temps de regarder l'horreur bien dans le trou des orbites vides
Donnez-moi le temps de vous respirer de vous sentir humer l'air de vos cheveux empoussierrés de vent
Je prendrai le temps d'apprendre votre alphabet donnez-moi seulement la respiration
permettez-moi d'avoir le temps
si l'on me donne le temps de trois respirations j'apprendrai trois lettres et m'approcherai un peu plus de vous
Je veux construire ma ville pour rencontrer - vous rencontrer
ai ouvert les yeux sur vous vous tous mais n'ai plus de sang pour irriguer leurs vaisseaux et deviens aveugle yeux bientôt éclatés et y aura pas même du sang sur la terre puisque la terre n'a pas connu la matière de mes doigts de mes paumes
Laissez-moi être hors pour respirer, dehors avec le vent et les rencontres, les mots et les pierres
grandirai j'accepterai de grandir d'affronter de courage je suis déjà de toute de force crispée mais être forte dans l'élan l'élan de la respiration

Laissez-moi le temps pour respirer respirer et alors mon souffle ira vers vous

et je ne serai plus le petit matin d'Antigone,plus seulement le petit matin d'Antigone serai toute la journée de toutes les Antigones et des Ismènes et des nounous et des rois-oncles et des oedipes et cadavres troués aveugles

deviendrai même pas grande fille deviendrai le monde car deviendrai plus rien plus moi (presque plus moi:il faut être encore un peu soi pour rencontrer et la folie qui m'accable ce soir encore ne me fait pas tout à fait oublier cela)

telle propension à devenir folle ne pas respirer dangereux pour mon irrigation crânienne et alors risque de devenir folle dans l'acte pour l'instant sens juste les 60°à l'intérieur du corps et l'apnéel'apnée

mercredi 6 octobre 2010


j'écris quelques traces ici pour m'assurer que je tiens encore l'éveil
              ,même si je tremble de toutes ces heures accumulées même si je ne me sens plus humaine
mais ce n'est plus ici que je trace des voies au-devant ,
ici il n'y a que des voix qui viennent de loin, et je me retourne, et je ne vois rien
ici n'a plus lieu

alors trembler, de l'espace qui ne peut pas encore se faire entre les secousses,    avant de pouvoir ouvrir cet espace,         ailleurs.




samedi 2 octobre 2010


et je ne comprends pas pourquoi je suis restée seule à pleurer dans le cinéma


LIRE


Vos lectures : je tremble à chaque mot, avant chaque mot - je brûle ma peau à lire vos mots |  je suis trop sensible pour vous lire  |   pourquoi ai-je si peur ?   je lis un peu et chaque fois je dois m'interrompre et écrire pour ralentir les rythmes incohérents de mon coeur  |
de quoi ai-je si peur ?
plus je veux vous lire moins je le peux
 -  je dois faire des cures de non-lecture  -  
vous lire c'est cesser de se protéger   et je n'en suis qu'à l'effleurement je vous lis rapidement je ne m'attarde pas j'ai encore trop peur
trop peur de m'embourber les pieds et la tête avec mais peur plus encore de rester en surface
 alors je me fais flammes qui lèchent les marais et les poussières, volatiles, rapides,  sans perforer,
volontairement sans perforer

pourtant je me suis engagée : à vous lire
ma vie d'été à mille à l'heure pour amasser la neige au-devant de moi et faire un chemin blanc, silence ,  une chambre blanche,   où je pourrai vous lire où je devrai vous lire ,
où encore une fois je me dresserai majuscule devant ma peur
je vous regarderai bien en face, déjà pétrifiée par les glaces ,   et j'énoncerai tous vos noms avec les miens   - et des syllabes mêlées le grand noir qu'on y entend.


bleu


Je fonctionne à l'émotionnel - je peux à peine te lire tellement je/tu - je fonctionne pas - comprends que par les larmes - donnez-moi le monde à comprendre à travers les larmes - que je comprenne le monde à travers les larmes - il n'y a qu'ainsi que - bien sûr je ne comprends pas je ne comprends pas vraiment - mais il n'y a qu'ainsi, par la fenêtre émotionnelle, que le monde se présente à moi (prend présence)  ;    pour voir les yeux doivent se recouvrir de fines pellicules de larmes °
mes yeux tantôt clos tantôt pluie