jeudi 28 octobre 2010

A la nuit


Yeux écarquillés dans la nuit où je refuse nuit après nuit de dormir
et les langues qui partent en fuseaux depuis les écrans de lumière éclatés sur la page éclatés soudainement tel bourgeon éclot éclate violemment tout son sang coquelicot sur la page noire de nuit
et les yeux malgré lunettes après lunettes superposées ne voient bientôt plus que ces jets noirs et blancs et couleurs sur la page et plus grand chose d'autre
tout flou tout flou je peine à voir ce que j'écris aussi je tente de tomber poussière de l'écran des cils de cornée mais rien à faire
cherche la pierre sous la terre tasse la terre sur les côtés tente frayer chemin parvenir aux sites naufragés on se hisse sans savoir si l'on est invité mais on voit la main tendu à n'importe qui viendra
alors je ne vois pas ce qu'il me dit, suis devenue aveugle,
devrais apprendre par coeur les langues pas encore nées des pages à venir pour sauver du naufrage les dialogues et ne pas hisser seule dans l'arche sa solitude (toute petite,toute fermée,toute stupide comme au premier jour,premier jour toujours chaque matin,on n'a rien appris quand le sommeil est venu écraser la nuit sur notre crâne)
ne peux me relire j'écris je décharge je porte l'honneur dans la nuit à ceux qui écrivent la nuit je vous sais tous de nuit vous qui ouvrez fenêtres claires dans opacité grise brouillard des jours et des nuits (la couleur inchangée jour/nuit)
je porte l'honneur comme un cri à ceux-là qui écarquillent mes yeux dans la nuit travaillent à ma myopie pour mieux voir ce qui se trame sous les mots soi-disant toujours les mêmes
je pousse les mots en avant de mon aveuglement parce que grâce à vous je sais que chaque mot est différent et porte en lui peut-être toute une puissance à nous de la révéler toute une puissance de révélation c'est le mot qui révélera le monde c'est pas toi toi tu ne fera que le porter le hisser à surface et ce sera déjà pas mal
alors je me cramponne à l'ancre de nuit volage qui fait jaillir parfois artifice lumière crue frappante surgit et on se frappe la tête lorsque passant flirtant de pages en pages de lieux à lieux on se frappe soudain à ce surgissement que l'on croyait chercher que l'on ne cherchait guère que l'on ignorait chercher mais c'est bien lui dans la nuit qu'on cherchait les yeux écarquillés c'est pour ça les yeux brouillés flous aveugles c'est pour ça c'est pour voir enfin, voir (

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