mercredi 30 juin 2010


Quelle est la couleur de l'heure où les paupières se ferment et s'entrouvrent, se ferment -
Quelle est la couleur oubliée, de cet instant à étirer
comme un corps au drap de chaleur
au drap de vapeur, de chaleur échappée
Où l'on oublie les ongles sur la chair nue (et pâle)
Les entrecorps qui se croisent, se prolongent, s'allongent,
Et j'oublie le nom du sommeil,
sa couleur changeante a passé sur mes yeux et assoupie je passe au-dessous du sens
- calme, heureuse, à l'heure de couleur oubliée.

mercredi 23 juin 2010

notes anciennes et brouillons sur le Journal d'Alix et, à partir de lui, sur la forme du journal (début mai)


***
journal : forme littéraire qui se propose d'être imparfaite


Sum up :
Le journal se présente d'emblée comme imparfait - ou plus exactement comme ne tendant pas à la perfection - , aussi peut-on avancer dans le journal sans la crainte paralysante de ne pas atteindre la perfection.

Développement (mais pas sûr que j'y dise quelque chose de plus -à relire) : 

Pour certains (pour moi, pour Alix il me semble) :
C'est parce que le journal n'a pas à être parfait, qu'on peut écrire le journal.
Nous ne pouvons écrire une "oeuvre" (qui se présente comme achevée) car nous la voudrions parfaite. 
Or, le journal, lui, n'est que fragments du jour juxtaposés (même si parfois coordonnés) comme le sont les jours.
Vie inachevée, en perpétuel mouvement, en tension,
journal inachevé, idem, idem, etc. journal imparfait donc puisqu'on n'est pas mort.
(et l'on mourra sans avoir noté l'instant de la mort : ainsi la vie s'achève sans achever le journal et le journal peut éternellement prétendre à son inachèvement et donc à sa légitimité à être imparfait)

Journal par ailleurs se propose d'être spontané, pas ou peu (re)travaillé
- et donc là aussi ne se propose pas comme fin la perfection et peut donc se permettre en toute largesse d'être amplement imparfait

- d'autant que journal se propose de n'être lu que par celui qui l'écrit
° et lorsque ce n'est pas le cas, on feint que cela le soit - accord tacite entre celui qui l'écrit et celui qui le lit, si bien que la publication est ce qui parait fiction (ou du moins accident) (passe au second plan, dissimulant paradoxe privé/public)

Mais revenons à l'idée de : spontanéité
Dans le journal (et non seulement par son biais), on travaille l'écriture par l'écriture sans cesse de nouveaux fragments : on ne (re)travaille pas ces fragments, on travaille par fragments.
(et ceci encore permis par le fait qu'on accepte d'emblée l'imperfection, que cela soit partie intégrante et même nécessaire au projet)
Perpétuelle avancée sans retour en arrière
Permet de voir l'écriture évoluer
Permet de faire évoluer son écriture (et d'évoluer dans l'écriture) dans un élan vital, dans une dynamique non pas sans à coups mais sans longs arrêts et sans retours en arrière
Permet de ne pas être trop sévère avec soi-même - sévérité qui chez les perfectionnistes peut mener à la paralysie.
Permet donc de ne pas se paralyser et d'être dans avancée perpétuelle.
N'empêche pas que l'on relise de temps en temps d'anciens fragments d'anciens jours et que cette lecture enrichisse l'écriture des prochains jours (par évolution de l'écriture mais aussi par échos entre les jours les lumières)

Journal est création et non créé : processus perpétuellement en cours (et voici qu'en 3 mots je dis 3 fois la même chose, comme si on n'avait pas compris!)
Journal ne se pose jamais comme achevé comme parfait :
de l'inachevé posé chaque jour
- tout s'accumule sans qu'il n'y ait jamais entité (non seulement car inachevé mais aussi car on peut statuer aussi bien sur le non-lien que sur le lien entre les fragments)

Résumé :
journal se présente d'emblée comme imparfait car : 
-spontanéité, affirme (implicitement) de ne pas être retravaillé
-journal est sensé être écrit pour soi - presque des notes repères, pouvant ne pas être développées, et donc légitimité d'autant plus grande à être imparfait (développement, tension vers le parfaire se ferait hors journal)
-journal forme inachevée donc imparfaite
-se propose (prétend plus ou moins) être miroir de la vie : hors vie ne peut être que tension (à la rigueur tension vers la perfection) et non perfection (sinon on serait mort) : vie = puissance, mort = acte (et encore). Donc journal à l'image de la vie doit pas être forme parfaite et figée mais forme imparfaite et en mouvement


***
ambiguïté réel de soi/fiction de soi

ambiguïté présente dans toute la littérature mais présente avec plus grande acuité dans forme du journal - permettrait donc probablement d'étudier cette ambiguïté dans la littérature en général à partir du journal.

Ambiguïté présente dans le journal d'Alix (étudier dans quelle mesure - ne sais pas bien encore).
Ambiguïté aussi présente, ce me semble, dans ses photographies.
On attend de la photographie qu'elle dise le réel et il semble qu'elle ne puisse s'y soustraire
- photos d'Alix mêmes ne s'y soustraient pas tout à fait puisque présente des objets du monde réel.
Cependant photographies d'Alix semblent plus proches de fictions que réels, ou du moins plus irréelles que réelles (dimension fantasmagorique ?)
- permis par les techniques de tirage etc. qui sont étape fondamentale de l'art photographique d'Alix Cléo.

Peut-être inversion ? : 
on attend plus réel de la photographie et irréel de l'écriture,
et Alix semble donner le contraire.
Ouai bof.
De toute façon mes notions de réel/irréel/fiction,etc. ne sont pas définies donc je ne peux pas réfléchir là-dessus. Voilà juste des pistes, voir si avancer plus loin est intéressant ou non à jeter.

Possibilités du journal (de la littérature en général aussi, mais avec confusions moins grandes probablement) :
Création de soi comme fiction
Création de l'autre comme fiction
Création du monde comme fiction (mais cela le journal s'y attarde sûrement moins que d'autres formes littéraires - notamment le roman ou la poésie)
Création des rapports comme fictions

Peut aller jusqu'à créer : rapports fictionnels réel-fiction qui disent le réel de soi.
(ouhla!)


mardi 22 juin 2010


et le lendemain terreur déplacée à d'autres heures

douleur déplacée à une strate juste au-dessous de la conscience de jour

- et on se dit : pourquoi donc encore une soirée comme celle-ci

quand on sait la première règle et qu'on ne la respecte pas : dans ces soirs tristes ouvrir un livre plutôt que l'ordinateur.

et mauvaise hygiène de vie qui revient au galop - qu'est-ce qu'on fumerait ces soirs-là si l'on fumait

heureusement que l'on a jusqu'ici évité de boire seule.

alors non pas grande misère juste petite médiocrité

et l'on se dégoûte et l'on ne peut dormir que veillée par l'écran d'ordinateur chantant.

Reine des Glaces ? si seulement. et puis non.

lundi 21 juin 2010

on ne meurt jamais assez lorsqu'on a mal
- on se contente d'écouter en boucle la même mélodie
de ruminer en boucle ses images noires -
de boire successivement les mêmes verres de noir -
de ne rien inventer
d'être minuscule et de s'aplatir plus encore
à terre allongé et l'on voudrait s'enterrer - mais pas la force pas la force
on se contente de ne pas savoir dormir
de ne rien savoir dire inventer
de boire des verres et des verres de noir
(la bouche pleine d'encre)-serait image trop forte pour médiocrité de ce soir


même pas idée d'un appel
même pas idée de faire passer le temps


on est là fixé dans l'instant
à ne pas savoir s'en dépâtir 
s'en aller


ce sera le lever du jour qui nous déplacera un peu plus loin
et nous empêchera de rester fixé là


- comme dans l'Avenue de Vincennes on a pu rester des heures à balader ses intestins sur le trottoir
tous ces lieux dégueulassés par nos pas traînants jusqu'au soir suivant 




on ne peut que écrire mornes bêtises on ne peut rien inventer
pas la force pas la force
ces soirs où la force nous quitte à jamais
- et où personne ne vient nous enterrer [pas même une soeur avec ses ongles terreux]




je suis à la nuit noire de suie sans mot dire
maudire inutile
je laisse mon corps mourir sur le quai où les mouettes.
et bientôt les vagues aussi
babines retroussées sur le gisant abandonné.
il n'y a pas de regret aucun geste nul tressaillement.
laissée à la douceur d'être emportée , par le flot et ressac
par la nuit sans étoile
l'absent noyé avec soi
et nul regard au fond des eaux, nulle parole
nulle parole à manquer nul regard éloigné
sans trouble je m'endors
. bateau ivre épave du dessous .


juste envie d'être seule pendant des heures - 
besoin de ça ; régulièrement


- ai peur d'avoir aussi peur qu'Alix à la lecture de son journal

avec cette oeuvre seule matière déjà trop dense (trop opaque - et trouée) pour un travail sur deux ans

serait sera échec de chaque jour comme on lit chaque jour comme elle écrit le jour la nuit

ne pourra faire qu'échec de cela

ne pourra que trouer matière trouée

peut-on ériger cathédrale académique avec bois déjà mité et agencements désordonnés ?

devrai mettre fin à mon travail
à moi-même

et partir mourir dans un pays qui ne me connait pas


envie d'écrire lire jusqu'au soir inclus


p128 :

27.VII.1981




ACR aussi : des blancs -avec seule une date (voir mon propre journal)


créer des journées qui ne se ressemblent en rien :


journal : à la porte duquel on est toujours après même être entré

ce qui me fascine aussi bien : l'opacité du journal

et à tenir soi aussi un journal on sait que journal est palais des glaces pas seulement miroirs moins miroirs que plusieurs portes et toujours certaines fermées qu'on ne voit pas même après même avoir ouvert d'autres portes
et qu'on voit tout - et rien - et - perdu dans les reflets
perdus dans le labyrinthe même qu'on s'est construit

quand on se perd dans son propre labyrinthe avancée avec plus de peine encore dans le labyrinthe des autres 
- mais comme on aime se perdre . . .


(p121)

17.IV.81

no music,no poetry.no prose.no photographs.no philosophy.no work.no rest.no events.light sometimes,come sunshine,come night.



ciel gris, jaune, gris


Poésie, Roubaud
(extrait pris sur le Tiers Livre, dans un article de François Bon - http://www.tierslivre.net/spip/spip.php?article33)
(j'ai ajouté les surlignages en gras)

Il me fallait un style approprié, un style de vie ET un style de poésie (le style n’est ni une forme, ni un ’quoi dire, quoi vouloir dire’). Il fallait en outre qu’ils soient en accord l’un avec l’autre. 
Il existe au moins un modèle adéquat à mon intention, tel que je le comprends et telle que je la comprends (et telles que je comprends ces questions aujourd’hui) : le style que l’ermite-poète japonais médiéval Kamo no Chomeil appelle le rakki-tai, lestyle pour dompter les démons
Il le présente comme un des dix styles de poésie dont il dresse la liste (->branche 1, cap 5, § 84). Mais il ne s’agit pas seulement de poésie (ou de prose) : la décision d’ermicité qu’il prit peut aussi s’interpréter comme le choix d’un style de vie destiné à tenir les démons à distance, d’une vie elle-même en rakki-tai. (La tradition érémitique occidentale, aussi bien celle des premiers ermites chrétiens, du temps de Cassian, que celle, plus tardive, des ermites irlandais ; ou encore celle de Joachim de Flore (qui me sont plus familières et plus proches sentimentalement, à cause de leur lien avec la poésie) est bien telle, qui met en oeuvre ce que j’ai choisi de reconnaître comme l’équivalent de plusieurs de ces styles (style des résonances crépusculaires, style du double, style du charme éthéré et les invoque dans la même visée : la capture, l’apprivoisement, l’éloignement des démons (et peut-être aussi des anges, de beaucoup plus redoutables pour une décision de survie que les démons). 
Dans ce lien de la vie à la poésie, d’autres styles interviennent (on ne peut trouver aucun lien réel entre la poésie, telle que, devenue publique (c’est sa seule et véritable existence), elle fait effet, et la vie de celui qui l’a produite, mais uniquement un lien d’insertion d’un aspect de la vie (l’activité de la poésie) parmi les autres ; et ce lien est stylistique). 
Principalement, en ce qui me concerne, j’ai choisi (en dehors du style majeur, le rakki-tai, donc) :
— le style des choses comme elles sont
— celui des vieilles paroles en des temps nouveaux
— et surtout, surtout, de loin celui auquel j’ai le plus pensé depuis, le style dit du sentiment des choses, le mono no aware ... 
("Le mono no aware est l’esprit du aware (émotion nostalgique) découvert dans les mono (choses, objets). C’est un "monde qui pourrait exister" (arubeki sekai) aperçu dans les objets tels qu’ils sont. On pourrait dire que c’est monde de sentiments nés de l’harmonie existante entre l’esprit et la forme des choses [...] C’est un sentiment que l’on éprouvera aussi bien dans l’allégresse d’une matinée de printemps que dans la tristesse d’une soirée d’automne. Si j’avais à le définir, je dirais qu’il se compose surtout de la tranquillité d’un sentiment tendre et nostalgique. C’est à partir de cette acception qu’il est devenu aussi sentiment de tristesse" (d’après Hisamatsu Sen’ichi).) 
Tous mes efforts, longemps (et aujourd’hui souvent encore : c’est un effort qui doit être sans cesse renouvelé), pour m’établir dans la poésie ont été avant tout dans le style du rakki-tai. (Je ne l’ai identifié que beaucoup plus tard.)
extrait de Poésie : , p 92-93

alix : journal : "Je n'ai pas souvent été au bout d'un projet"


tu    aurais     été     ainsi:"vulnérable,maladroit,frêle,grave,précoce,adulte."


Importance du lieu où l'on (s') écrit

Trouver les lieux, changer les lieux, fixer des lieux en soi

se fixer sur des lieux avancer sur ces lieux s'ériger ou allongé contact à la terre au bitume aux cadavres morts de soi

avoir lieu - à peine ' s'éclore se déclore

avoir lieu fugitivement : écrire journal.


langue d'Alix : langue du journal
dit la rapidité de l'heure le chaos de soi 
langue qui est au changement
langue changeante selon headache arrimé à l'instant 
selon alcool au poignet lumière sur négatif 30°5 dehors

langue silence ou langue cri ou langue cri silence

journal semblerait pas destiné à publication à lecture (pas même de J.)
mais journal lu : et quelles conséquences ?

(notamment : comment ce journal change mon journal, ma vie ?)


Travailler sur le journal ce serait peut-être travailler sur la vie et la traduction de la vie
vie vécue par morceaux tracée par morceaux
et morceaux tracés qui sont aussi nouveaux morceaux dans la vie

Comment un individu est constitué autant par ce qu'il écrit que par. (le reste?)



Moi qui nouvelle à chaque jour. ne parvenant à me fixer. ne devant me fixer.

moyen (fin?) d'être tout de même chaque jour

être parce qu'on est au jour (et à la nuit évident)


journal forme déchirée instable
travailler le journal (le sien celui des autres) parce qu'on est soi-même instable et déchirance
peut-être même seule cette déchirance

on est de brouillon fin se dégradant s'effilant à la lumière du jour à chaque seconde abîmée


alors noter la seconde
parce qu'on est rien d'autre que ce temps qui meurt




Journal : forme en perpétuel mouvement et qui se propose de ne jamais s'achever.




Refuser toute autre forme : refuser les formes fixes


être au changement


écrire le changement car on est et il n'y a que changement




A chaque seconde cri silence




journal c'est aussi : appel que l'on destine à n'être pas entendu
appel qui s'étouffe


et quel paradoxe que le journal publié ? que dit-il ?
le journal reste-t-il journal ou n'est-il qu'apparence de journal ?
solitude ou feinte solitude exhibitionniste - obscène ?


creuser ces paradoxes (non pas les résoudre)








et j'ajoute et elle prolonge :
(9.IV.81 - Journal p118) :
"(...)
cahier:
             viser l'unité            ne pas viser l'unité
                         l'heure, le jour, la date:autant de discontinuités,de percées vers le discret


(...)


  ne pas croire à l'histoire:se confiner dans la chronologie,l'éternelle répétition du même,comme le journal,s'accomplissant en un axe horizontal qui est le temps,sans autre retour que la relecture,mémoire qui ne bouge rien,et ne le peut(puisque je n'y touche pas,ne change aucun mot),s'abolit dans 'l'autre axe',l'événement (et c'est ce second axe qui fait basculer la perspective:jamais le présent ne vous donne un point de vue imprenable sur le passé;il débouche plutôt sur l'impasse brutale où avenir et passé semblent ne plus se distinguer,mais où s'achèvent toutes les choses)."




me rappeler de noter ici les notes de mon cahier de brouillon (le noir?le vert?) sur le journal (à la lecture d'Alix). Pour ne pas les perdre, seulement.


et je lis le lendemain (le jour même, des heures et des lumières passées) | ceci :

"(...) à l'image de la décision obscure dans sa version la plus triviale et la plus nette:pile ou face de la monnaie(qui a une petite chance de perturbation,deux faces mais aussi un bord)"(AlixCléo)

s'avancer sur terrain accidenté pour accroître les chances de perturbation 
ne pas choisir pour ne pas exclure
quand on sait qu'on est pile et face - chercher le tranchant
ne pas trancher rester au bord : sur le tranchant

et ainsi avancer : rouler

(tomber sur pile ou face : s'arrêter. tomber paralysé.)

Comme devant muet le futur d'on n'a pas de nom
   Car horizon est ligne qu'on ne sait si on peut briser ou peut-être retourner
pour voir l'envers - et l'envers est-il similaire ou inverse ?
  et les métamorphoses de soi peut-on y croire ? 

Serai-je capable d'écrire seule pour nulle voix qui me traverserait ?

J'aurais toujours écrit pour être écoutée - 
écrire non pas pour dire mais pour être dite | par l'écoute des autres d'un autre

Constituer l'Andalousie comme espace vierge
dans lequel je pourrais torturer les muscles d'angoisse  passer à l'encre noire
- seulement dans une lumière plus blanche encore | qui met à mort radicalement sans détour.

Déplacer la geôle plus près de l'enfer

Car à mon rôle de prisonnière fidèle seule princesse possible : en haillons hurlant gueulant non pas à libération mais à torture partagée cheveux tressés de noeuds par les poux muscles paralysés hantés par les punaises et soudain et les mains démunies pendantes ou plus souvent encore agrippées aux barreaux de froid de ma peau sans doigts

et tout cela dans le silence bien sûr car grande classe la princesse
reine des glaces la princesse et mesquine avec ça
trompant jusqu'à elle-même
! stupide à force d'intelligence de bassesse

c'est la solitude que j'attends dans son grand manteau noir
qu'il m'enlève sur la place blanche et m'immole sur ce territoire terre noire sans peuple ni adresse

qu'il baise ma main et mon corps,  tout mon orgueil excroissance jusqu'au ventre l'orgueil,
je m'enfante moi-même à force de nombrilisme et ombilic jamais coupé je me perpétue
et ce n'est toujours que moi seule moi seule avec moi seule et rien à faire

et rumine comme je clamerais les mots noirs des grands noms
ceux auxquels j'aime vouer un culte imbécile
ombres de papier qui n'ont d'autre existence que divine invisible

et comme je suis seule j'ouvre les cuisses à cette langue inerte,
comme latine, 
voilà un i grec à l'y

et je malmène en galère vire chavire de toutes ces langues
noires de kierkegaard et blanches blanchot obscur

ces langues pour dissimuler mon mutisme autiste
pour enfouir en ma gorge la langue des autres
et foin de ma solitude elle dort à la grange se cache aux premiers rayons du jour


Et je ne sais si partir je pourrais oublier


Et je ne sais si partir je voudrais oublier


Aller à la vie vibrante pour devenir sons rauques à la gorge et clamés
pour chanter les autres avec autres 
passer toute la journée de la vie à courir rire chanter
pleurer réparer communiquer


Aller à l'Espagne rouge des robes flamencos
Aux yeux noirs gitans d'Egypte éjectée 


Couleurs espagnoles pour peut-être bifurquer vers ma face couleur 


ou Pile ! je reste corps blanc esprit blanc transparence d'inexistence 
de parler langue noire vilaine savante dans bouche de bêtise
pour place blanche et large et solitude solitude
sublime
sublime solitude


ou Pile et Face et je serai toujours cela + plus toutes les incurvations excroissances malformations déformations et + plus bien sûr profil fin mais anguleux
de la pièce de monnaie qui ne vaut pas deux sous mais demande
- sinon à changer à échanger



samedi 19 juin 2010

PAUL


" tu vois, Le plus grand plaisir que jcontinue à éprouver, même quand jsuis malheureux ou que jme suis encore foutu dans une impasse que jpeux plus bouger, 
bah y a un truc qui vieillit pas 
c'est l'étonnement
quand jmets ma main dans la culotte d'une fille que je connais pas pour la première fois

à chaque fois ça fait peur,
c'est toujours différent, et puis | c'est tel-llement bizarre

C'est pas du don juanisme; parce que j'ai pas couché avec tant de filles que ça,

mais c'est ce moment là qui fait que tu sens qu't'es en vie.

Les gens bidonnent, te racontent que c'est toujours pareil,
que un con est un con,
que les garçons c'est différent et qu'les filles c'est pareil.

Les filles c'est tel-llement précisément différent,
, à chaque fois

C'est pas seulement de l'infidélité
y a des filles même si tu les connais, hein,
chaque fois qu'tu mets la main, 
tu sens qu'c'est bizarre, pas gagné

C'est dur à expliquer

Et si tu parles de ça aux gens,
ils te disent,
eh ça va tu peux commencer à t'habituer quand même,
C'est infantile,
Ou alors ils se moquent, tu dois pas être une bonne affaire au lit, 
ce qui est tragiquement drôle quand on sait comment la plupart des gens baisent quand même.

Tu vois cette réaction des gens qui font la moue,
genre,
ouai j'espère que t'as mieux dans la vie

Alors que tu sais que eux ils ont rien de mieux dans la vie
, même pas ça 

Ouai c'est ça le plus grand plaisir,
le moment où je sens qu'la vie ça vaut tellement la peine;
même si c'est trop cher payé

c'est pas Heidegger qui monte sur sa putain de montagne ou jsais pas quoi

Non c'est. le visage de la fille t'vois qu'a un peu peur 
qui remonte l'élastique, le début du ventre ,  tu vois


Faut pas croire les gens qui te disent eh ça va renonce à ça y a mieux

Y aura rien de mieux dans la vie et, t'as intérêt à t'en satisfaire, et c'est déjà pas mal.

(Pour une amie)


A cet instant de la rupture, il faut ramener à soi tous ses muscles - 


A cet instant de la rupture, c'est : on a donné tout soi et il faut reprendre tout soi

se ramener à soi et coller de nouveau avec soi-même, rien qu'avec soi-même
(n'être pas plus épais que soi-même)


A cet instant de la rupture, c'est : on a donné tout soi et on s'est appuyé sur cet autre à qui on se donnait (-comme en fait sous prétexte sous excuse de se donner, c'était l'autre qui nous donnait un appui un support),
et alors il faut ramener à soi tous ses muscles et tenir de nouveau debout par ses propres muscles à la verticale


Et lorsque la rupture dure des mois (des années),
c'est ramener à soi ses muscles par secousses
annuler une contraction par une détente - sous les auspices d'on avait cru (.mais non).


Et lorsque la relation n'a été que rupture (perpétuelle et perpétuellement renouvelée), les muscles désorientés se sont bandés à tout-va et amputés à tout-rompre.


Et lorsqu'il n'y a eu que rupture pas même relation, rien ne change :
en voulant se donner on se donnait déjà
(et comme dans une relation on se donne déjà à un imaginaire,  on ne pourrait établir qu'une distinction de degrés.
et cette distinction de degrés elle-même n'a aucune épaisseur matérialité nulle : il n'y a pas de degrés dans la douleur)





Contre les gisants lever l'érection
et fuck aux cadavres de même pas une vie
Verticalité contre horizontalité
je veux plus que ça, moi, je veux plus que ça
cet instant où tu trembles détournes le regard je veux cette image répétée infiniment
film fixé sur ces quelques secondes, rien que du noir troué de bobine tout autour, 
parce que je t'aime infiniment que tu es infiniment aimable 
et ton absence - vivace - tout contre mon esprit.

jeudi 17 juin 2010


je plonge ma tête dans l'encre de nuit et 


blindness°colourless°la nuit viendra clore les paupières sans que je me sois levée pour voir le dernier ciel@de lait encore
et cette fois-ci peut m'importe blanc=noir
rien'a de couleur

- ouvrir cette fenêtre virtuelle c'est déjà trop / presqu'ouvrir la fenêtre de la chambre close

je suis dans le blanc blanc silence

pour me sauver

dans le blanc blanc silence noir,   se sauver quelques heures (quelques jours, quelques mois|si seulement) de leur exigence|de paroles, de sons articulés et de cacophonie

se sauver dans le ciel laissé blanc à la fenêtre, aveugle,

être au silence de la page où ressac de mort comme seule vie à avoir,  seule logique,
- on ne comprend que cela : quel autre sens que cette vacuité cette douleur 

-comme si : la vie joyeuse, la vie claire de ceux qui ont les yeux bleus et la vie claire était mensonge grotesque, risible, que l'on écrase du talon privant de vie ceux qui - avaient - cru -

et l'on se sent de moindre épaisseur, amputé de ces instants se dissolvant dans le ri-sible
parce que parfois nos yeux s'éclaircissent - et alors on meurt on meurt

tenir sa vie enfermée dans un poing noir
se mettre soi-même dans une tour noire - verticale ou à l'horizontale,
boîte noire où s'assèchent nos membres allongés et maigres, maigres, secs.cassants.se brisant à chaque nouveau noeud de membre - sans membrane nulle membrane - sans firmament.

photographier l'intestin qui s'écoule par la gorge.
sortir avec lui la langue maternelle qui fait horreur - et l'ombilic

se retrouver sans langue, apatride, perdu dans les dédales d'une bibliothèque souterraine - et sans lumières
que des livres à lire sans lumière, sans langue, sans dess(e)in
que des pages à remuer incessamment pour en soulever la poussière et s'en asphyxier

mourir dans le sublime de ce que l'on a sacré

cela seulement parce qu'il fallait sacrer quelque chose pour pouvoir mourir sans trop de honte {et plus difficile encore justifier le temps de vie qui précède cette mort}

que l'on sorte au soleil et c'est tout le sacré qui s'écroule, et nous avec, notre justification.

on a plus qu'à vivre misérablement, de nos grossièretés réelles, sans chichis, sans sacre.


Gloire à nous qui nous trompons si bien et pousser loin devant les pestiférés !

Ceux qui vivent sans mensonge, ceux qui vivent de la vie même.

mercredi 16 juin 2010


à des voix inconnues laissée au bord et l'on oublie toute langue 
l'andalou à la souplesse du corps, et des cheveux, aussi,
et, oui, oui
et les souvenirs projetés au-devant des vies qui ne sont pas nôtres
l'océan sur cette langue lancée au-devant des lèvres et des corps
ou plutôt non, pas océan mais pluie, pluie de midi aux tropiques,
c'est un corps humide, et nu, nu, sur la langue qui pousse les dents et s'infiltre,
langue perméable qui fond les peaux aux autres,
qui ramène à la poitrine le crâne vieux de dix mille ans d'histoires
crâne où la voix résonne et les flammèches des bougies nées de chaleur,
et toi aussi, et elle, ombre de mon ombre, et incarnation plus chair que ma chair,
et les jasmins d'où
et 
et aussi, oui,
son ombre à son ombre, sa chair à sa chair, son coeur à son coeur,
pas plus gros qu'un noyau d'avocat,
tenant dans la main à même les veines,
nervures de la chair du fruit et de son coeur,
et ton coeur, oui,
et
et l'on sent cette langue qui se délie et lie l'un l'autre lascivement abandonnés l'un à l'autre,
langoureusement le chat déplie ses muscles et étend
la langue parle en nous un futur parallèle à notre propre vie et que l'on ne pourra jamais rejoindre, 
et où l'on s'endort pourtant à chaque soleil de suie,
aux souffles au bord desquels.on dit oui sans attendre.
chants de gorge entre deux haleines naît celle qu'on attendait, devait naître de nous, oui,
comme on s'attendait soi-même et que l'on voudrait qu'on nous attende,
quelque part, tout près, oui,
et car nous, oui,
on attend une langue qui parle en nous, qui nous parle muette,

parle muet dans mon corps et froisse du bout des doigts les poussières qui soufflent sur la peau,
ouvre mes paupières comme on les ferme, 
que la langue reste musique inintelligible, 
amadrugar, 
et que je sois non pas seule mais Très Mil.


Prend sa main et guide-la jusqu'au Nil,
bateaux par vos ongles suspendus au soleil,
cartes désaxées, en attente.