mercredi 20 octobre 2010

Pourquoi Antigone avait raison


Certains disent qu'Antigone n'avait pas raison. Je tiens cependant qu'Antigone est le personnage de Résistance et qu'elle est le seul personnage Sublime. Antigone leur rappelle qu'elle aime la vie plus que vous tous - qui est debout cinq heures pour les pieds dans les rosées et la tête à la lune et au soleil ? C'est parce qu'elle aime ainsi la vie qu'elle ne peut l'humilier la soumettre à ce qui l'opprime - atteinte dans ses plus extrêmes retranchements, lorsqu'on lui retire même la mort (mort arrachée à la vie, laissée sans rituel). Concéder quelque chose de la vie, la mort même, sacrifier amputer la vie dans ses bornes illimitées, c'est consigner la vie à rien moins que médiocre : c'est accepter que la vie ne soit plus entière ne soit plus sublime, c'est abaisser la vie à un médiocre accidentel. Ce qu'Antigone refuse.

En se faisant prête à mourir pour réintégrer la mort à la vie (enterrer son frère), Antigone redonne à la vie son intégrité sublime - et cela même si elle échoue. Si quelqu'un est prêt à mourir pour la vie, celle-ci devient à nouveau entière elle est accomplie jusque dans ses marges et s'en retrouve intacte.

Quel que fût ce qu'on imputait à la vie, ne pas l'accepter c'est nier cette amputation et celle-ci s'en trouve annulée. Il devient clair que ce membre arraché à la vie était bien du corps même de la vie, que la vie était faite de ce corps-là, puisque quelqu'un meurt pour ce membre - par l'arrachement de ce membre. Mourir ainsi c'est dire que la vie n'est plus la vie depuis qu'il lui manque ce membre.
Avant notre mort cela n'était ni faux ni vrai : notre mort fait vrai cet énoncé.

[N'étant plus dans la vie pour vivre cet énoncé devenu vrai par notre mort, nous faisons la vie vraie pour ceux qui restent en vie. Celui qui meurt ne perd pas la vie, puisque la vie sans sa mort n'était plus vie. En mourant, il redonne la vie à ceux qui restent en vie. Vivant, il serait resté mort parmi les morts.]

Lorsque c'est la mort même qui est amputée à la vie, on redonne la mort à la vie en mourant pour elle. Il devient alors manifeste que la mort et la vie sont faites du même pain, du même corps. Notre mort (dé)montre que la vie avait besoin de la mort pour être entière.



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