lundi 23 août 2010

Valérie


Elle s’appelle Valérie. Elle est arrivée ce matin, ces cheveux ne dégoulinaient pas encore. Souriante, vive, tout était facile. C’était elle que j’avais eu au téléphone l’heure d’avant. Je lui avais sorti tous les livres dont elle avait besoin : pour elle, la journée commençait facilement.

Je l’ai revue une demi-heure plus tard, sous la pluie (une pluie sans concession), elle avec ses petits bras tout maigres et son tee-shirt d’été, à essayer de brancher la batterie de son moteur sur celle d’un gentil voisin de parking. De « parking » : ils étaient en fait sur les places livraisons devant mon magasin.

Ils étaient déjà trempés, mais le gentil voisin a fini par sortir d’on ne sait où un parapluie de secours – pourquoi ne l’avait-il donc pas fait plus tôt ?

Ils ont continué leur scène de cinéma au moins une demi-heure, devant la vitrine, et dedans c’était moi qui regardais dehors – c’était eux derrière la vitrine, et ils étaient tellement beaux.

Je pense qu’elle a ri – mais à un moment, lorsqu’elle a tenté de démarrer le moteur, je l’ai vue derrière son volant : abattue pour un peu, pour un tout petit moment.

Moi je l’aurais bien aidée, mais je n’avais pas ma place dans ce film – et les employés ne sortent pas du magasin pendant leur service : internés.

Maintenant il y a un gros camion blanc à la place de leurs deux voitures : je suppose qu’ils ont fini par réussir à décoller. Ou bien dissous par la pluie ils ont coulé le long du trottoir et ont rejoint l’égout.

En tout cas, c’est comme si le travail remplaçait l’humain – à nouveau.

Camion monstre et lisse, les cheveux dégoulinants se sont enfuis – et moi, je n’ai pas pu bouger.

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