jeudi 8 avril 2010

Aux antipodes de Blanchot : la littérature engagée de Sartre


L'écriture, selon l'exposé de Sartre dans Qu'est-ce que la littérature ?, est une reconnaissance mutuelle de la liberté de l'auteur et du lecteur.
Ainsi, "l'écrivain, homme libre s'adressant à des hommes libres, n'a qu'un seul sujet : la liberté."
Puisqu'écrire c'est reconnaître la liberté de son lecteur et de l'humanité entière, il serait contradictoire de prôner l'asservissement d'une partie de l'humanité - de là qu' "on ne puisse pas écrire un bon roman à la louange de l'antisémitisme". Réciproquement, le lecteur ne peut approuver un livre qui prône l'asservissement d'une population ou de quelque(s) homme(s) alors qu'il reconnaît en lisant sa propre liberté - et par là la liberté de l'humanité - et, en reconnaissant la liberté de l'auteur, exige de lui qu'il reconnaisse la sienne.
Ainsi, "la liberté d'écrire implique la liberté du citoyen" puisqu'il faut que le lecteur se reconnaisse comme libre pour que notre liberté d'auteur soit reconnue (la reconnaissance de la liberté ne peut fonctionner qu'à double sens).
S'engager dans l'écriture, c'est donc s'engager dans la lutte pour la liberté. Ainsi, si la liberté est menacée au point qu'on ne puisse plus être libre dans ses écrits, il faut alors changer d'arme : troquer la plume pour l'épée, ou la machine à écrire pour l'arme à feu.
Cependant, dans cette dernière idée, Sartre reconnaît que l'écriture n'est pas toute puissante...

Si l'écriture est tout à fait impuissante chez Blanchot, ne donnant naissance à rien et s'avortant elle-même, elle n'est pas toute puissante chez Sartre...

PS : lorsqu'au premier chapitre Sartre parle d'une littérature au "discours si curieusement agencé qu'il équivaut à un silence, une pensée qui se conteste elle-même (...)", n'attaque-t-il pas implicitement Blanchot et d'autres écrivains de l'écriture du silence ?

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